Partage d’enseignements autour du modèle de Patrick Lencioni

1. Contexte des établissements de santé

Avant même la crise du COVID-19, les établissement de santé hospitaliers comptent entre 10 et 14% d’absentéisme.

Les taux de burn-out observés chez les médecins sont trois fois plus élevés que dans d’autres métiers selon cette étude scientifique de Mars 2019.

La crise sanitaire a à la fois recentré beaucoup d’équipes et d’établissements sur leur coeur de métier, l’excellence et le soin. Il est sorti de cette période des « pépites qu’il faudra valoriser, reconnaître et cultiver.

De l’autre côté du tableau, dans certains services, les dysfonctionnements déjà existants se sont amplifiés avec des problématiques de gestion des conflits, de communication, de gouvernance et d’organisation.

Les dysfonctionnements d’équipes sont inhérents à toute organisation et rassurez-vous: il est possible d’y remédier ! 

Travailler en équipe est une gymnastique complexe.

Un des principaux facteurs de succès des équipes, au-delà de la qualité de ses compétences techniques est sa capacité à mettre en oeuvre ses qualités humaines et relationnelles au service d’un but commun.

Dans l’univers de la santé, le sens du collectif est évident: il s’agit de la qualité de la prise en charge du patient.

Toutefois, la complexité de l’équation réside dans le fait que les établissements de santé pour servir leur mission doivent aussi intégrer des dimensions d’efficacité qui supposent de fluidifier les relations entre les équipes médicales, paramédicales et les services administratifs, et au sein de ses équipes.   

The 5 dysfunctions of a team

A ce titre, Patrick Lencioni, l’écrivain américain spécialisé dans la gestion d’équipe et la santé organisationnelle, propose un modèle pour faire du travail en équipe, un levier de performance. Dans son livre The Five Dysfunctions of a Team, l’auteur dresse un schéma pyramidal des 5 dysfonctionnements possibles d’une équipe par ordre graduels :

  1. Le manque de Confiance
  2. Des conflits trop inexistants ou, au contraire trop présents
  3. Le risque de désengagement

  4. Des responsabilités peu claires
  5. Le risque d’inattention aux résultats
Les 5 dysfonctionnements d'une équipe

De toute évidence, pour qu’une structure résiste aux épreuves du temps, il faut avant tout de bonnes fondations. La confiance est la base de toute organisation, car elle relie les personne entre elles dans son sens étymologique.  

Pour la nourrir, il est essentiel de promouvoir une culture du retour d’expérience continue. Les dirigeants et les managers hospitaliers qui sauront faire preuve de vulnérabilité gagneront la confiance de leurs équipes. Combien savent briser les tabous des erreurs médicales par exemple? La culture du secret a laissé place à une culture de la transparence. Et les leaders savent reconnaître leurs erreurs, les partager, les reconnaître et en retirer des enseignements créeront un terreau fertile d’apprentissage et d’intelligence collective.

Lors de nos premières expériences terrain à l’AP-HP, la communication est revenu comme un des sujets phares reconnus pour la majeure partie des professionnels de santé à tous les niveaux. Savoir bien communiquer. Pourquoi est-ce si important dans ces métiers? Sans doute parce que la quantité d’interlocuteurs auxquels les professionnels de santé font face est considérable. Entre les patients, leurs familles, la diversité des métiers médicaux, paramédicaux, administratifs, les Agences Régionales de Santé: que de complexité à gérer!  

Communiquer avec assertivité, trouver le ton juste et équilibré face à son interlocuteur est essentiel pour construire une équipe solide. L’indicateur qui en résultera sera le fait d’accepter des confrontations saines. Celles-ci font office de ciment pour les fondations et garantissent le maintien de la confiance au sein de l’équipe. C’est l’écoute active de toutes les parties prenantes et l’acceptation que les conflits peuvent être fertiles dans un dynamique de groupe qui lui permettra de s’élever. A contrario, l’évitement des conflits conduirait à un risque de désengagement et une perte d’efficacité pour atteindre un but commun.  Il existe des méthodes de communication d’équipes mises en place au sein de services d’établissement de santé qui ont déjà fait leurs preuves, comme par exemple la démarche participative mise en place par le Dr Colombat.

Lorsqu’une équipe s’autorise à avoir des saines confrontations qui sont le juste équilibre entre une communication assertive et un niveau de conflit modéré qui permettra à tous de s’exprimer en confiance, il en résulte un niveau d’engagement supérieur. Il est donc nécessaire de consolider la structure avec des piliers qui prendront l’apparence de l’engagement véritable.  

 Ainsi, c’est ici qu’entre en jeu la responsabilisation mutuelle. Lorsque l’équipe s’engage dans la confiance et se confronte sainement, il est nécessaire que les membres se tiennent mutuellement responsables de leurs actions et de leurs gestes. Par exemple, des établissements de santé ont mis en place des méthodes issues du Lean Management qui engagent des équipes pluridisciplinaires à travailler sur des indicateurs communs, comme détaillé Lydwine Vaillant dans son ouvrage qui nous a fait l’honneur de participer à l’un de nos webinaires.  

Enfin, maintenant que la structure est bâtie nous pouvons poser la toiture, métaphorisé ici par les résultats d’équipe.

La méthode des OKRs développée par Intel (Objectifs & Key Results) permet de décliner des objectifs stratégiques à tous les niveaux d’une organisation.

Une grande partie des dysfonctionnements dont souffrent les organisations hospitalières et les établissements de santé peuvent être liées à des objectifs parfois antagonistes d’un département à l’autre, des rivalités entre services,…

On constate souvent d’un côté, des indicateurs tels que la qualité de soin et la sécurité des patients vus par les professions médicales et paramédicales. De l’autre côté, les impératifs de nombre d’entrées patients, de productivité vus par les équipes dirigeantes et administratives sont également essentiels pour assurer la pérennité des établissements de santé.

Quel langage commun créer ? Quels indicateurs simples peuvent être mis en place quand on constate que le T2A est arrivé à bout d’essoufflement ? 

Des établissements exemplaires tels que la Clinique Pasteur de Toulouse dirigée par Dominque Pon ont mis en place des démarches participatives à tous les niveaux et ainsi pu construire des systèmes d’indicateurs que les équipes s’approprient véritablement. 

2. Quelle démarche suivre pour travailler sur les fondamentaux d’une équipe ?

cohésion des équipes et la continuité des soins

La première étape est de mesurer, car nous connaissons l’adapte: « On agit sur ce que l’on mesure ». Pour cela, vous pouvez nous contacter via ce formulaire pour que nous vous détaillons comment nous intégrons ce modèle à nos dispositifs d’accompagnement.  

Pistes d’action et de réflexion pour votre établissement de santé ou votre service :

Critère de Lencioni : Confiance d’équipe

Définition: La confiance est la certitude que les intentions des autres sont « bonnes »et qu’il est inutile d’être sur ses gardes. 

Étymologie: Se lier avec…Les membres de l’équipe sont à l’aise quand il s’agit de montrer leur vulnérabilité.

Marche à suivre:

  1. Renforcer la connaissance de vos collaborateur sur le plan professionnel et personnel 
  2. Développer une culture du retour d’expérience : « ce que tu apportes à l’équipe, c’est… tes talents…»
  3. Education aux toxines relationnelles d’équipe ( L’attaque, la défense, le mépris, la fuite) et à ses antidotes 
  4. Chercher des solutions plutôt que des coupables. 
  5. Enrichir son regard et créer un langage commun. Exemple: la méthodologie DESC
  6. Effectuer une évaluation 360°
  7. Des dynamiques d’équipe régulières et du parrainage renforcé

Confrontations saines

La confrontation saine est le fait d’accepter le conflit, comme un élément sain pour adresser les enjeux de l’équipe dans le respect de la diversité des points de vue. 

  1. Reconnaître que la confrontation est saine et nécessaire« mettre les pieds dans le plat » 
  2. Prendre l’engagement de ne pas clore un sujet tant qu’on n’est pas allée au bout
  3. Un leader qui rassure et confirme la plus-value de la confrontation en cours
  4. Surmonter son désir de protéger les gens en interrompant une conversation houleuse qui peut aller vers la confrontation quand le besoin s’en fait sentir

Engagement véritable

L’engagement est la disposition à mettre en œuvre les décisions et plans d’action décidés. Il est lié à la clarté de la décision et de son acceptation (réelle et non feinte) et au sens que l’on donne à son action.

  1. S’assurer que les décisions prises sont bien appliquées et respectées.
  2. Établir des échéances et préciser les premières étapes du plan d’action 
  3. Etudier les scénarios possibles dans une dynamique de conduite du changement (au cas où il y a de la paralysie) 
  4. Un leader qui identifie, développe et sollicite les qualités de son équipe
  5. Donner du sens, faire adhérer à une vision commune.  

Responsabilité mutuelle

Chaque membre de l’équipe se tient mutuellement responsable de la mise en oeuvre des plans d’action.

  1. Établir et diffuser des objectifs et des indicateurs de performance
  2. Un leader qui agit quand c’est nécessaire comme « arbitre »
  3. Chacun devient acteur sur ses objectifs respectifs et communique dessus.

Résultats d’équipe

Les équipiers se concentrent sur l’atteinte de résultats collectifs avec des objectifs clairs définis en amont

  1. Définir et s’assurer que les indicateurs clés de performance sont bien compris et acceptés
  2. Établir un système d’encouragement fondé sur les résultats 
  3. Le leader et chaque membre de l’équipe restent objectifs et alignés sur des objectifs communs avec des responsabilités clairement identifiées.
travail d'équipe

3. Conclusion

 

Si l’on résume, construire une équipe qui fonctionne est un travail quotidien qui sollicite un diagnostic précis, notamment grâce à des outils tels que le modèle de Lencioni.

De plus, cela suppose de développer ses compétences humaines, relationnelles et managériales au niveau individuel et collectif.

Pourquoi est-ce si important ? Car si vous souhaitez prendre soin des patients et sécuriser la qualité des soins dans la durée tout en participant au développement et la bonne santé économique de votre établissement, cela fait sens d’investir du temps et de l’énergie pour travailler sur les 5 fondamentaux que nous vous avons présenté.

C’est pourquoi, nous partageons la conviction que prendre soin des professionnels de santé, et du fonctionnement de vos équipes est un enjeu de santé publique pour mieux prendre en charge les patients.